Van Abbemuseum. Museum of Arte Útil (Useful Art)

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« Museum of Arte Útil. » Design: Collective Works.

http://museumarteutil.net/*
Museum of Arte Útil au Van Abbemuseum

«On 7 December the old building of the Van Abbemuseum will reopen as the Museum of Arte Útil, a place where art’s use value and social function will be put to the test. The Museum of Arte Útil is initiated by Tania Bruguera and developed with the Van Abbemuseum and constructLab. It is the latest phase of a project Bruguera began ten years ago and that included an academy in Havana; the Arte Útil lab at Queens Museum; and residencies at Immigrant Movement International, New York.

Arte Útil roughly translates into English as ‘useful art‘ but it goes further suggesting art as a tool or device. The Museum of Arte Útil will present an archive of case studies spanning nearly two centuries. These case studies imagine, create and implement beneficial outcomes by producing tactics that change how we act in society. They are evidence of a broader change taking place today. Whether through self-organised groups, individual initiatives or the rise of user generated content people are developing new methods and social formations to deal with issues that were once the domain of the state. The Museum of Arte Útil will show how these initiatives are not isolated incidents, bur part of a global movement shaping our contemporary world.

From a museum to a Social Power Plant
How can we ‘use’ the museum? How can it become a civic institution for production and output? Through this project, the ambition is to transform the museum into a Social Power Plant, where spectators become users and collective, transformative energy can be generated for use in the world outside. The case studies provide the fuel for the Social Power Plant, the presentations are a toolkit for users to re-purpose tactics and methodologies to their own ends.

The central scenographic device is a large wooden circle that cuts through all the walls of the museum breaking through the white cube structure of the building and generating a dynamic circulation system. The visitor encounters spaces according to seven strategies that best describe Arte Útil: ‘Use it Yourself,’ ‘Institutional Re-purpose,’ ‘A-Legal,’ ‘Space Hijack,’ ‘Open Access,’ ‘Legislative Change,’ and ‘Reforming Capital.’ Each room features live projects alongside documentation of case studies internationally. A number of artists will work in the museum and the city over a sustained period of time, whilst many of the live projects relate directly to Eindhoven, through partnerships with local organisations. A full list of the artists and organisations involved in the Museum of Arte Útil is available on the Van Abbemuseum website.

Debate and contribute to Arte Útil
Arte Útil projects and case studies are constantly being created and therefore the ‘Association of Arte Útil’ will be open online where new examples can be submitted. In the museum, a programme of public discussions, workshops and presentations will tackle some of the central questions and problems raised by the term. Taking place in ‘The Room of Controversies’ they will include four main sessions: ‘Arte Útil, Gentrification and Misuse,’ ‘Arte Útil, Activism and Sincerity,’ ‘Arte Útil, Social Design and Instrumentalisation,’ ‘Arte Útil, 2.0 Culture and Disobedience.’ The central gallery, the ‘Archive room,’ will be an interactive core where users gain insights into different tactics happening throughout the world and where case studies can be suggested, assessed against the criteria, printed and added to the archive. For full details of the online archive and public programme, please visit the Museum of Arte Útil website.

A Lexicon for Usership
A lexicon of terms has been written by theorist Stephen Wright for the Museum of Arte Útil and will serve as a textual tool kit for users. The lexicon includes terms that Wright feels should be ‘retired’ alongside what he refers to as ’emergent concepts’ and ‘modes of usership.’ Stephen Wright is a writer and professor at the European School of Visual Arts.»

*On est très loin d’Ad Reinhardt :

«L’unique signification de l’art en tant que tel, aussi bien ancien que contemporain, est sa signification artistique. Une fois séparé de son époque, de son lieu et de son utilité d’origine, et placé dans un musée, l’objet d’art se vide et se purifie de toutes ses significations, à l’exception d’une seule. Devenu pièce de musée d’art, l’objet religieux perd toute signification religieuse. Aucune personne sensée ne se rendra au musée pour y vénérer ou étudier autre chose qu’une œuvre d’art.
Le seul lieu convenant à l’art en tant que tel est le musée des beaux-arts. L’unique raison d’être d’un musée des beaux-arts est la conservation de l’art ancien et moderne, qui ne pourrait être refait ou qui n’a pas besoin d’être refait. Ce musée devrait exclure tout ce qui n’est pas des beaux-arts et se démarquer nettement d’un musée d’ethnologie, de géologie, d’archéologie, d’histoire, des arts décoratifs, des arts techniques ou militaires, de tout autre musée. Un musée est un trésor ou un tombeau, non pas un bureau de vente ou un lieu de divertissement. […] Et tout ce qui vient troubler l’espace situé hors du temps [hétérotopie]**, du bruit, de l’atmosphère, de la vie, d’un véritable musée est manque de respect.»
in « L’art en tant que tel », [art-as-art], 1962 Article publié dans Art International, VI, n°10, Lugano, décembre 1962. Traduction Annick Baudoin. Reproduit dans Art en théorie, 1900-1990. Une anthologie par Charles Harrison et Paul Wood, éditions Hazan.p. 888

** Musées et bibliothèques sont des hétérotopies

« Quatrième principe. Les hétérotopies sont liées, le plus souvent, à des découpages du temps, c’est-à-dire qu’elles ouvrent sur ce qu’on pourrait appeler, par pure symétrie, des hétérochronies ; l’hétérotopie se met à fonctionner à plein lorsque les hommes se trouvent dans une sorte de rupture absolue avec leur temps traditionnel; on voit par là que le cimetière est bien un lieu hautement hétérotopique, puisque le cimetière commence avec cette étrange hétérochronie qu’est, pour un individu, la perte de la vie, et cette quasi éternité où il ne cesse pas de se dissoudre et de s’effacer.
D’une façon générale, dans une société comme la nôtre, hétérotopie et hétérochronie s’organisent et s’arrangent d’une façon relativement complexe. Il y a d’abord les hétérotopies du temps qui s’accumule à l’infini, par exemple les musées, les bibliothèques; musées et bibliothèques sont des hétérotopies dans lesquelles le temps ne cesse de s’amonceler et de se jucher au sommet de lui-même, alors qu’au XVIIe, jusqu’à la fin du XVIIe siècle encore, les musées et les bibliothèques étaient l’expression d’un choix individuel. En revanche, l’idée de tout accumuler, l’idée de constituer une sorte d’archive générale, la volonté d’enfermer dans un lieu tous les temps, toutes les époques, toutes les formes, tous les goûts, l’idée de constituer un lieu de tous les temps qui soit lui-même hors du temps, et inaccessible à sa morsure, le projet d’organiser ainsi une sorte d’accumulation perpétuelle et indéfinie du temps dans un lieu qui ne bougerait pas, eh bien, tout cela appartient à notre modernité. Le musée et la bibliothèque sont des hétérotopies qui sont propres à la culture occidentale du XIXe siècle. »
[début de la plage 5 du CD] FOUCAULT Michel, « Des espaces autres « , Dits et écrits, 1984, Quarto Gallimard, pp. 1571-1581 + Utopies et hétérotopies, CD, INA mémoire vive, 2004

Addendum: En août 2006, Christian Bernard fait le récit oral rétrospectif et exhaustif du Musée d’art moderne et contemporain de Genève qu’il a créé de toutes pièces. Il développe cette idée du promeneur de musée et de la « parole comme médium de l’espace muséal ».

Extraits : « 01_ Background sensuel. Parler de ce qu’on voit, ça paraît plus naturel à la radio où l’on ne voit rien dans un enregistrement qui ne restitue que du son, mais parler de ce qu’on voit, c’est précisément la condition de voir et on en fait vraiment l’épreuve dans la promenade au sein du musée où tant de signes sont articulés dont très peu forment de petites chaînes signifiantes pour le promeneur même attentif. Et la parole est vraiment le médium de l’espace muséal tel que l’on conçoit. En même temps la parole dans le musée, c’est évidemment la nôtre, c’est la parole du musée au sens de ses qualités sonores propres parce que ce n’est pas un studio d’enregistrement où les sons sont bienvenus dans une sorte de neutralité que ne dérange qu’un bruit de chaise parfois. En revanche dans le musée, il y a une qualité sonore du musée, de cet espace post-industriel et qui fait partie de la tonalité et qui est une des conditions de construction de sa présentation et qui contribue à qualifier périphériquement la conception qu’on en a : le bruit des pas, la façon dont ça résonne et dont ça résonne différemment d’un étage à l’autre, la plus ou moins grande proximité des bruits de la rue ou des chantiers avoisinants. Il y a toute une dimension sonore spécifique qui croise des ambiances du passé et du présent, qui croise des dimensions sonores propres à l’usine et à l’architecture qui a été conçue pour elle et puis évidemment ensuite ces dimensions sonores se tressent avec celles qui sont proposées par les aménagements du musée et les œuvres et selon les salles plus ou moins grandes, plus ou moins saturées d’œuvres et selon la nature des œuvres évidemment la sonorité ambiante varie. De ça, cet enregistrement ne rend pas compte, non plus. Effectivement, c’est une chose qui fera toujours défaut en plus de l’image que nous n’avons pas quand on enregistre, mais que cet enregistrement accompagnera peut-être. Et aussi la dimension olfactive qui n’est pas négligeable au musée et qui là aussi tresse des éléments du passé notamment la profonde basse continue des odeurs d’huile des machines qui occupaient ce lieu et puis l’odeur de peinture fraîche qui est très forte au début des séquences et qui va s’éteignant pendant les trois ou quatre mois où les expositions sont présentées. Donc il y a ce concours des odeurs du passé et du présent qui forment aussi la qualité du lieu. Il y a évidemment le concours des lumières et les tubes fluorescents qui éclairent et tout cela construit un complexe de sensations qui est très subtile en fait et qu’on perçoit peu et qu’évidemment l’enregistrement ne peut évoquer qu’à titre de description mais ne peut pas faire pressentir. C’était très important pour moi d’avoir ce background sensuel ou perceptif qui n’a rien à voir avec celui qu’offrent les musées qu’on construit pour ça et qui ne donnent que l’odeur de l’architecte, si je puis dire, et des conceptions qu’il se fait des matières et des espaces. »
Autre référence, mais ce texte est ancien Christian BERNARD : « Art, musée, contemporain, artiste », notes à propos du MAMCO, années 90.