Les écrivains s’engagent pour le climat

Libération du jour
par Sylvie GOUTTEBARON et Yves BOUDIER

TRIBUNE

«Face à la menace, maintenant si précise, du changement climatique, face à l’espoir aussi que représente la mobilisation mondiale sur ce sujet, que peut la littérature? Se fera-t-elle entendre? Que peuvent les mots face aux désastres annoncés? Témoigner? Emouvoir? Faire prendre conscience? Pousser à la réflexion? Que peut encore le langage dans ce monde de l’image, de l’immédiateté, dans l’urgence où nous somme ? Si la littérature n’est pas que divertissement et loisir, si elle participe, du plus intime, de l’aventure humaine, elle ne peut tout simplement pas rester indifférente. Ses forces, même si maigres en apparence, ne doit-elle pas les mettre toutes entières dans la balance, pour peser contre la fatalité, la lâcheté, la tristesse d’un monde sans possibles?

La Maison des écrivains et de la littérature a décidé de s’engager. A la lecture de certains de nos contemporains, nous sentons bien que la nature est plus que jamais considérée dans son rapport à l’homme, comme un appel à plus d’attention, de soin. Un désir de décentrement, d’ouverture. C’est parce que nous savons que tel ou tel auteur est attentif à cela dans son œuvre, que nous engageons maintenant les écrivains, dans leur ensemble, à prendre la parole.

La Maison a commencé à esquisser cette démarche, avec le cycle de rencontres littéraires intitulé Climat que propose Cécile Wajsbrot. Pour faire entendre les voix des auteurs avant la conférence climat de Paris, elle s’apprête à inventer un grand rendez-vous de dimension internationale, à l’automne 2015, comme un «Parlement sensible des auteurs», colloque sans modèle et passionné, en présence des plus grands auteurs, des plus engagés, des plus engageants, des plus inattendus. Hors de toute chapelle littéraire, dans l’invention d’un geste collectif. Commandes de textes, débats, conférences, performances, nous ne savons pas encore la forme que cela prendra, face à l’inouï de la situation. Nous sommes seulement convaincus, avec les écrivains qui nous accompagnent dans notre réflexion, que la littérature peut quelque chose, qu’elle doit faire quelque chose. Fortement investie dans l’éducation artistique et culturelle à travers ses différents programmes, la Maison des écrivains et de la littérature entend aussi élargir cette initiative dans une dimension de partage avec les plus jeunes.

Michel Deguy l’affirme dans Ecologiques (Hermann) : «Si l’écologie n’entretient pas sa relation avec la pensée, elle cesse d’être radicale.» L’enjeu est tel que nous devons dépasser nos frontières, déborder le politique par l’art et la culture, le sociétal par l’imaginaire, la littérature par tout ce qui la dépasse, et réciproquement. Il faut dans le combat se jeter de toutes ses forces : c’est précisément ce que sait faire la littérature au meilleur d’elle-même. Et c’est avec confiance et entrain que nous avons commencé à imaginer ce grand rendez-vous, y invitant tous ceux qui ne se résignent pas.»

Ainsi que : Esther Tellermann, Gisèle Berkman, Christian Garcin, Jacques Rebotier, Céline Curiol, Isabelle Jarry, Lucien Suel, Benoît Conort, David Christoffel, Véronique Pittolo, Cécile Wajsbrot.
Directrice et président de la Maison des écrivains et de la littérature
Lien Michel Deguy > http://lantb.net/uebersicht/?p=4942